Changé le: 29/10/2024
A la découverte du monde du cannabis au 19ème siècle
Saviez-vous que vers le milieu du 19ème siècle, il existait à Paris un groupe qui s’intéressait aux effets des drogues ? Oui, à une époque où le cannabis n’était pas encore très connu en Occident, des intellectuels et des artistes parisiens ont commencé à se réunir dans un club secret et exclusif connu sous le nom de « Club des Hashischins ».
Fondé par le Dr Jacques-Joseph Moreau, rejoint par d’autres fervents partisans de l’usage du cannabis, ce club est devenu, entre 1844 et 1849, un lieu de rencontre pour explorer les effets psychédéliques de la plante et discuter ensuite des expériences vécues. Curieux ? Oui, admettons-le, mais regardons de plus près ce qui s’est passé dans ce morceau d’histoire de la culture du cannabis.
La curiosité de l’expérimentation
Au fil des siècles, les artistes ont constamment investi dans la perception sensorielle avec le désir de repousser les limites, de repousser les frontières du visible, comme s’ils étaient toujours à la recherche de quelque chose au-delà de la simple représentation de la réalité.
À différentes époques, les intellectuels ont été fascinés par différentes substances, légales ou non, psychotropes et psychédéliques, capables d’altérer les états mentaux, dont ils ont exploré les effets et les propriétés. Parfois, ils ont réussi à les utiliser à des fins artistiques, tandis qu’à d’autres moments, malheureusement, ils sont restés subjugués et dépendants de ces substances.
Nous savons, par exemple, que de nombreux écrivains et intellectuels ont utilisé l’absinthe pour amplifier leur inspiration. En effet, c’est la boisson chère à Van Gogh et Toulouse-Lautrec qui a influencé le célèbre tableau d’Edgar Degas, « Absinthe », représentant deux buveurs hypnotisés par la « fée verte », et qui a également inspiré Édouard Manet et Pablo Picasso.
Ce que nous allons explorer aujourd’hui, c’est comment la curiosité et la fascination pour les substances psychotropes et psychédéliques, capables d’altérer les états mentaux, ont attiré au milieu du 19ème siècle d’autres artistes illustres tels que Victor Hugo, Alexandre Dumas et Charles Baudelaire, qui ont été brièvement membres du Club des Hashischins.
Origine et fondation du Club des Hashischins
Le Club des Hashischins était un club littéraire et culturel parisien, fondé en 1844, incarnation audacieuse et provocatrice de l’intellectualisme parisien du XIXe siècle. Il a été créé par Jacques-Joseph Moreau et un cercle excentrique d’écrivains, d’artistes et de poètes, dont Gautier, Baudelaire et Honoré de Balzac, ainsi que le peintre Eugène Delacroix. Le club est devenu un refuge pour ceux qui souhaitaient explorer les limites de la conscience par l’usage du cannabis.
Le Club des Hashischins n’a pas duré longtemps, mais il est indéniable qu’il était célèbre dans le monde entier et qu’il a donné à la France une place de choix dans l’histoire de la culture du cannabis. Les réunions du club étaient exclusives et avaient lieu environ une fois par mois dans une villa privée de l’île de Saint-Louis, connue sous le nom d’Hôtel de Pimodan ou d’Hôtel Lauzun.
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Que se passait-il lors de ces mystérieuses réunions ?
Au cours de ces longues soirées, les participants explorent le haschisch, testant ses effets à la fois créatifs et thérapeutiques. Ils s’attardaient à discuter, à comparer leurs expériences et à mettre en évidence les différents sentiments éprouvés, qui variaient d’une personne à l’autre, avec parfois des effets négatifs.
Certains membres ont reconnu que la substance favorisait le sommeil, tandis que d’autres ont perçu une augmentation de la productivité et une stimulation de l’imagination. D’un autre côté, des effets négatifs tels que l’augmentation de la détresse et de l’anxiété et, en cas d’utilisation prolongée, des problèmes de mémoire à court terme, ont également été attestés.
Ils ont expérimenté une préparation à base de haschisch appelée dawamesk.
Qu’est-ce que le dawamesk ?
Aujourd’hui, nous pouvons considérer le dawamesk comme l’un des premiers produits comestibles à base de cannabis. Originaire d’Algérie et d’autres pays arabes, le dawamesk est un produit comestible à base de cannabis, constitué de sommités combinées à des ingrédients tels que le sucre, le jus d’orange, la cannelle, les clous de girofle, la cardamome, la noix de muscade, les pistaches et les pignons de pin.
Après avoir assisté à sa préparation lors d’un de ses innombrables voyages en Afrique du Nord, le Dr Moreau a décidé d’introduire cette connaissance comme aliment de base lors des réunions du Club des Hashischins à Paris.
Dans le club, en effet, on s’attendait à une consommation massive de dawamesk, que les membres du club appelleraient plus tard « fantasias ». Sous la direction du Dr Moreau, les participants ingéraient du dawamesk, une pâte verdâtre ou une confiture à base de graisse, de miel et de pistaches (la version du club), et en ressentaient les effets, que l’on disait extrêmement intenses.
Les visions psychédéliques s’accompagnaient toutefois de violents maux d’estomac, ce qui a contribué à faire du dawamesk une substance notoire et redoutée par les membres du club.
Plusieurs témoignages suggèrent que de nombreux membres, déçus par l’expérience et se percevant comme des cobayes entre les mains du médecin, ont décidé de ne plus assister à ces réunions.
L’histoire et la préparation du dawamesk ont été décrites pour la première fois en Europe par le pharmacien M. Latourou lors d’une conférence à la Société pharmaceutique en 1847.
Qui sait ce qui se serait passé si le dawamesk avait été bu en même temps que les infusions de marijuana.
Baudelaire et son expérience avec les Hashischins
Quelle a été l’expérience de Baudelaire au sein du Club des Hashischins ? En fait, à la suite de cette expérience, Baudelaire a exposé une vision peu flatteuse du haschisch, atténuant son charme et son prestige dans son œuvre « Paradis artificiels ».
Pour se faire une idée de la pensée de Baudelaire, citons quelques phrases du chapitre Opium et haschisch de l’ouvrage précité :
“L’homme soumis aux phénomènes du haschisch n’est rien d’autre que le même homme augmenté, le même nombre augmenté à une très grande puissance.
Que les gens du monde et les ignorants, curieux de connaître des joies exceptionnelles, sachent donc bien qu’ils ne trouveront dans le haschisch rien de miraculeux, absolument rien que du naturel à l’excès.”
De 1843 à 1845, Baudelaire habite un appartement situé juste au-dessus du lieu de réunion du club, qu’il loue pour 350 francs. C’est là qu’il a trouvé l’inspiration pour son célèbre poème Invitation au voyage.
Baudelaire quitte le Club au bout de quelques années, après avoir vécu tout ce qu’il y avait à vivre. Cependant, insatisfait de cette expérience et se sentant peut-être traité comme une expérience par le Dr Moreau, il se rendit compte qu’il pouvait facilement développer son talent artistique sans avoir recours à l’expérimentation avec dawamesk.
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Gautier et son expérience au Club des Hashischins
Nous avons déjà mentionné que Théophile Gautier, le célèbre écrivain bohémien, était également l’un des membres du club du Dr Moreau. L’expérience du club a été partagée par Gautier dans un long récit en série intitulé « Le Haschich ».
Gautier a exploré en profondeur ses visions induites par la drogue et a décrit son expérience en trois étapes : une sensibilité accrue des sens, notamment au niveau auditif ; la perception d’un temps qui ne cesse de se dilater ; enfin, des visions d’images grotesques et effrayantes.
En 1846, Gautier publie un livre consacré au club intitulé « Club des hachichins », dans lequel il décrit en détail les expériences auxquelles il a participé et son initiation au groupe.
Nous en citons une partie courte et intéressante :
“Un soir de décembre, obéissant à une mystérieuse convocation, rédigée en termes énigmatiques, compréhensibles pour certains membres, incompréhensibles pour d’autres, j’arrivai dans un quartier reculé, sorte d’oasis de solitude en plein Paris.
C’est dans une vieille maison de l’île Saint-Louis, l’hôtel Pimodan, construit par Lauzun, que l’étrange club dont je venais de devenir membre tenait ses réunions mensuelles, auxquelles je m’apprêtais à assister pour la première fois…”
Tout comme Baudelaire, Gautier se rendit compte après son expérience qu’il pouvait se passer de ces réunions et que tout ce qu’il avait à prendre en termes de créativité dans ce monde avait déjà été atteint, et il quitta le club.
La rencontre entre Gautier et Baudelaire est un point positif indéniable du club : c’est là qu’est née leur profonde amitié. On apprendra plus tard que Théophile sera l’auteur de la préface du chef-d’œuvre de son ami Charles, Les Fleurs du mal.
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L’influence culturelle et la fin du Club
Le Club des Hashischins fut éphémère. Ce n’est pas un hasard si des écrivains comme Baudelaire ou Gautier l’abandonnent peu à peu. Entre autres, l’opinion publique et les autorités commencent à désapprouver la consommation de cannabis. C’est pourquoi les réunions mensuelles se font de plus en plus rares et le club se dissout à la fin des années 1940. Son impact culturel et son héritage ont survécu, continuant d’une certaine manière à influencer la pensée et l’art modernes.
C’est certainement le premier club que l’on peut compter dans le monde du cannabis, suivi vers les années 1970, mais au siècle suivant, c’est lui qui a initié le symbolisme du 420 et la Journée internationale du cannabis, le 20 avril de chaque année.
Curiosité : Comment le haschisch est-il arrivé en Europe ?
Entre le 12e et le 13e siècle, les croisés sont entrés en contact avec la secte musulmane des Ḥashīshiyya, dont vous devinez la signification ? Ceux qui se consacrent au haschisch.
Le terme moderne de « meurtrier » semble dériver du haschisch, car les hashīshiyya étaient connus pour leur férocité, à tel point que le mot a pris une connotation négative.
Cette secte d’assassins avait son quartier général dans la forteresse d’Alamut, en Perse (aujourd’hui Iran), et opérait entre la Syrie et la Palestine, terrorisant les villages par des pillages et une violence inouïe. Ils ont été vaincus par les Mongols de Gengis Khan vers le milieu du 13e siècle. Mais jusqu’alors, les Européens associaient le haschisch à ces terribles guerriers et à leurs actions violentes.
Cela dit, la première fois que les Européens ont eu un contact plus direct avec le haschisch, c’est lors de la campagne de Napoléon en Égypte, à la fin du XVIIIe siècle. À cette époque, les soldats français, pour soulager les douleurs physiques et psychologiques de la guerre, ont commencé à utiliser une nouvelle substance : le haschisch. Cette substance était depuis longtemps répandue parmi les populations arabes et les Européens, ne pouvant accéder à l’alcool, interdit dans les sociétés islamiques, ont commencé à imiter les indigènes et à expérimenter ses effets.
D’où les premiers contacts avec cette partie importante du monde du cannabis.
Conclusions
Le Club des Hashischins à Paris au 19ème siècle représente un chapitre intriguant de l’histoire de la culture du cannabis, soulignant l’intérêt des artistes et des intellectuels pour l’exploration des effets psychédéliques de la plante. Ce club exclusif, fondé par Jacques-Joseph Moreau et fréquenté par des noms illustres tels que Baudelaire et Gautier, offrait un environnement propice à l’expérimentation et à la discussion des effets du haschisch, y compris la consommation de dawamesk, l’un des premiers produits comestibles à base de cannabis.
Cependant, l’enthousiasme initial a été tempéré par des expériences négatives et par la désapprobation croissante du public et des autorités. Le club s’est dissous à la fin des années 1940, mais son impact culturel persiste, influençant la pensée et l’art modernes. Bien que son existence ait été brève, le Club des Hashischins reste un point de repère dans l’évolution de la compréhension et de l’utilisation du cannabis dans l’art et la culture.
Takeaways
- Le Club des Hashischins à Paris au 19ème siècle représente un exemple fascinant d’exploration intellectuelle audacieuse. Fondé par le Dr Jacques-Joseph Moreau et fréquenté par des artistes et des intellectuels tels que Baudelaire et Gautier, le club offrait un environnement propice à l’expérimentation des effets psychédéliques du cannabis.
- Bien que le Club des Hashischins ait été éphémère et se soit dissous à la fin des années 1940, son impact culturel persiste. Il a influencé la pensée et l’art modernes, soulignant l’intérêt des artistes et des intellectuels pour l’exploration des substances psychédéliques.
- Le club était connu pour sa consommation de dawamesk, l’un des premiers produits comestibles à base de cannabis. Cette préparation, à base de cannabis et d’ingrédients tels que le sucre, le jus d’orange et les épices, était consommée lors des réunions du club pour explorer ses effets.
- Les membres du Club des Hashischins ont rapporté des expériences variées avec le cannabis, allant de l’augmentation de la productivité et de la stimulation de l’imagination à l’augmentation de la détresse et de l’anxiété. Ces expériences ont contribué à une compréhension nuancée des effets du cannabis sur l’esprit.
- Le Club des Hashischins a inspiré des œuvres littéraires et artistiques, notamment les poèmes de Baudelaire et les écrits de Gautier. Cette influence sur la culture a perduré, soulignant l’importance de ce chapitre dans l’histoire de la culture du cannabis.
FAQ
Qu’est-ce que le Club des Hashischins ?
Le Club des Hashischins était un club littéraire et culturel parisien, fondé en 1844 par le Dr Jacques-Joseph Moreau et un cercle excentrique d’écrivains, d’artistes et de poètes. Il était connu pour être un lieu où l’on explorait les effets du cannabis sur la conscience.
Quels étaient les membres célèbres du Club des Hashischins ?
Parmi les membres célèbres du Club des Hashischins figuraient des écrivains comme Victor Hugo, Alexandre Dumas, Charles Baudelaire et Théophile Gautier, ainsi que des artistes comme le peintre Eugène Delacroix.
Quelles étaient les activités principales lors des réunions du Club des Hashischins ?
Lors des réunions du Club des Hashischins, les membres expérimentaient les effets du haschisch, discutaient de leurs expériences et partageaient leurs impressions. Ils consommaient également du dawamesk, un produit comestible à base de cannabis, et discutaient de ses effets.